Résumé
Le territoire du Grand Genève connaît l’un des plus forts taux de croissance urbaine d’Europe. Son patrimoine naturel et culturel, sa qualité urbaine et sa qualité de vie sont mis sous tension, en particulier au niveau des lisières urbaines (LU).
Interrogeant le rapport entre la ville et la nature, notre hypothèse est que les LU présentent une opportunité d’articulation entre les lieux urbains et les milieux naturels et ruraux, et de renaturation des espaces urbains.
Une lisière urbaine est définie comme un lieu à part entière, composé de milieux divers influencés par les espaces urbanisés, agricoles et naturels qui s’y rencontrent. Ce réseau de lieux, de milieux et de liens urbains et écologiques dessine une matrice territoriale qui participe de la qualité des territoires, des écosystèmes et des paysages métropolitains.
Ce rapport de synthèse est organisé en cinq parties et aborde les aspects suivants :
Partie I : Le flou sémantique de la notion de lisière urbaine et sa faible visibilité territoriale ne favorisent pas son appréhension et sa prise en compte dans les politiques publiques et les projets urbains. Définir cette notion est dès lors un enjeu de connaissance, de méthode et de gouvernance. Revenir aux stratégies de ville nature apparaît comme une opportunité de situer les LU dans les politiques métropolitaines.
Nous avons exploré les politiques publiques afin d’en mesurer les impacts sur les LU, et pour identifier de quelles manières elles peuvent être de potentiels leviers pour conserver, restaurer et améliorer les qualités des lisières urbaines. Des enquêtes auprès de professionnels de collectivités publiques, de bureaux d’étude et de hautes écoles, nous ont permis de constater que les lisières urbaines sont peu reconnues, mais que leurs enjeux rencontrent une attention émergente.
Partie II : Au travers des différentes disciplines représentées au sein du projet, nous proposons des méthodes et analyses à trois échelles d’un territoire-test pour caractériser les qualités urbaines, ambiantales, paysagères et écologiques des LU.
Partie III : Les enquêtes sur les perceptions, les vécus et les imaginaires des lisières urbaines auprès des habitants et usagers montrent combien les lisières urbaines constituent des lieux-ressources, d’expériences sensibles et d’évocations métaphoriques. Croisant diverses méthodes d’analyse, nous relevons qu’elles sont des lieux communs intermédiaires entre le maillage d’espaces publics et privé, multi-expériences et multi-usages souvent en conflit avec la conservation de la nature et du paysage et soulignant l’effet frontière.
Partie IV : La mise en perspective de nos analyses montre que les lisières urbaines se forment et évoluent selon un ensemble de dynamiques qui créent des types de liaisons, de lieux, de compositions ou encore, d’activations sensorielles ou temporelles. Ces dynamiques favorisent des effets territoriaux, de transitions, d’ambiances et de paysages ressentis, d’effets d’écran, de bord et/ou d’écotone constituant des tiers habitats pour les humains, la faune et la flore. A partir de ces caractéristiques, nous avons élaboré une typologie des lisières urbaines et des outils pour les représenter à l’échelle de l’agglomération, de la trame et du lieu, dont une cartographie collaborative des lisières urbaines potentielles.
Partie V : Afin de qualifier les lisières urbaines de manière interdisciplinaire et participative, ancré dans un territoire et ses projets, nous avons interagi avec les acteurs du territoire test pour cristalliser les enjeux des lisières urbaines, en caractérisant leurs qualités effectives et potentielles :
> Urbaines : confortant le maillage de liaisons douces, améliorant la qualité de composition avec les espaces urbains, naturels et ruraux adjacents, proposant un ensemble de lieux communs, complémentaires des espaces publics ...
> Paysagères : valorisant les prises de vue avec le paysage extraordinaire et ordinaire, confortant les pénétrantes de verdure...
> Ambiantales : favorisant des expériences multisensorielles, sonores, visuelles, lumineuses, thermiques en contrepoint du tissu urbain environnant et de ses nuisances...
> Écologiques : augmentant la biodiversité, et renforcer les connexions biologiques avec l’infrastructure écologique...
> Environnementales : filtrant des polluants, captant le carbone, créant des îlots de fraîcheur, limitant les risques (inondation, érosion) ...
> Patrimoniales : repérant les traces de l’histoire transfrontalière, dont des vieux arbres, l’architecture, des savoirs et savoir-faire porteurs d’identités rurales et urbaines ...
> Nourricières : renforçant les qualités nourricières de la nature (forêt, rivière, lac) de l’agriculture urbaine et péri-urbaine ; jardinage, haies et lisières fructifères.
> Sociales et sensibles : créant un lieu de vie partagé, permettant la cohabitation entre de multiples usages, une cogestion résiliente, un lieu de ressourcement et d’attachement à un paysage commun.
Sur la base de ces qualités et des enjeux associés, nous avons esquissé des pistes de stratégies d’action pour planifier un réseau de lisières-méandres à l’échelle de la métropole, de lisières-trames à l’échelle du bassin de vie (territoire transfrontalier Arve-Lac) et de lisières-lieux à l’échelle locale, contribuant à la qualité de vie et à la conservation des écosystème fragilisés de la métropole.
Téléchargements
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